Le FC Nantes était champion de France, le Bayern avait été couronné en Allemagne. L’affrontement entre les deux clubs en août 1973 était amical, il remua pourtant les foules : "Le bureau de location, ouvert peut-être un peu tardivement car on ne s’attendait pas à un tel empressement a été littéralement assiégé, écrivait Pierre Lautrey dans L'Equipe, le matin du match.

Pluie de stars à Saupin

Le Bayern était l’équipe montante du moment, elle était encore inférieure à l’Ajax mais on pressentait que les courbes des deux clubs allaient s’inverser d’autant que Cruyff s’apprêtait à quitter Amsterdam pour Barcelone. Ses figures de proue était Sepp Maier, Paul Breitner, Gerd Muller, Uli Hoeness et surtout son capitaine Franz Beckenbauer. Jamais la pelouse de Marcel-Saupin n’avait été foulée par autant de vedettes à la fois. Il y avait là l’ossature de l’équipe d’Allemagne, championne d’Europe en titre qui allait gagner la Coupe du monde un an plus tard, celle aussi, évidemment, du Bayern qui s’apprêtait à conquérir trois Coupe d’Europe des champions d’affilée (1974, 1975 et 1976).

En fait, Nantes, privé de deux éléments majeurs, Angel Marcos ("assassiné" par Merchadier quelques mois plus tôt) et Gilles Rampillon (opéré d’une épaule) ne fit pas le poids. Le Bayern l’emporta 4-0, score acquis à la pause, buts de Gerd Muller, Hoeness, Zobel et Roth. Côté nantais Erich Maas, formidable ailier gauche désireux de se rappeler au bon souvenir de ses anciens coéquipiers, avait pourtant fait belle impression, il avait tiré sur un poteau et contraint Maier à une sortie délicate et arrêt de chat. 
 

Nantes alignait l’équipe suivante : Bertrand-Demanes – Osman, Rio, Gardon, De Michèle – Claude Arribas, Michel - Blanchet, Couecou, Pech et Maas et on se doute qu’aucun d’eux, parmi les vivants, n’a oublié cette rencontre de prestige, pas plus d’ailleurs que les témoins tant la partie avait été belle et tant les Bavarois avaient donné une impression de plénitude, laquelle annonçait sans doute leurs exploits à venir tandis que la déconvenue des Nantais préfigurait l’élimination qu’allait leur infliger la modeste équipe danoise de Vejle en Coupe d’Europe.

« Je crois que vos joueurs manquent un peu de technique »

Franz Beckenbauer avait affiché beaucoup de classe sur le terrain. Il en eut tout autant en dehors en montrant une extraordinaire disponibilité pour une vedette de son envergure. Il répondit à toutes les sollicitations médiatiques, il signa de nombreux autographes et on croit encore l’entendre remercier ceux qui lui tendaient un papier ou une photo pour obtenir son paraphe.

Trois ans plus tôt, il avait éclairé une nuit mexicaine de son indomptable courage en luttant jusqu’au bout du bout d’un match avec une épaule étroitement bandée, le visage hermétiquement fermé à la douleur et là, dans la douceur de la nuit nantaise, il ne cessait de sourire, de parler, de commenter : "Je crois que vos joueurs manquent un peu de technique", glissa-t-il doucement, ce qui constituait un dur constant pour le football français puisqu’à l’époque le FC Nantes était la formation la plus technique et la plus offensive du pays.

Photos : collection Philippe Laurent.