La saison 1985/1986 est déjà bien avancée quand le FC Nantes porte sur ses épaules tous les espoirs du football français. Le premier tour des Coupes européennes a été une véritable bérézina pour les clubs de l’hexagone : Quatre des cinq équipes engagées ont été sorties dès le premier tour à une époque où chaque tour de coupe d’Europe se jouait en confrontation directe, par match aller-retour.
Partizan plein champ
Nantes reste donc la seule équipe française en lice, et lorsqu’elle reçoit le Partizan de Belgrade le 6 novembre 1985, un important dispositif télévisuel se met en place à la Beaujoire. Les caméras de TF1 sont présentes avec le duo vedette de commentateurs de la chaîne, les inénarrables Thierry Roland et Jean-Michel Larqué.
Au match aller, à Belgrade, les hommes de Jean-Claude avaient réalisé une performance de choix. D’un stade hostile sur une pelouse détrempée, ils étaient sortis avec un bon match nul. Les Yougoslaves avaient ouvert le score sur un ballon qu’Yvon Le Roux avait malencontreusement dévié dans la cage de Jean-Paul Bertrand-Demanes.
Mais si un Nantais avait marqué pour les Yougoslaves, c’est un Yougoslave qui allait marquer pour les Nantais, l’incontournable Vahid Halilhodzic parvenant à égaliser en seconde période.
Plein feux sur la Beaujoire
Le 6 novembre 1985, la Beaujoire s’enflamme pour ses Canaris. La station de radio qui sponsorise le club depuis bientôt dix ans a distribué des briquets au public et celui-ci illumine les tribunes la flamme ouverte. Sur le terrain, l’Argentin Jorge Burruchaga ouvre le feu en glissant le ballon dans la cage d’Omerovic, le gardien yougoslave.
En seconde période, José Touré dirige la manœuvre. Le ballon parvient dans les pieds de Loïc Amisse dont la frappe du gauche fait mouche. Dès lors, on n'arrête plus les Nantais. Juste avant l’heure de jeu, profitant d’une magnifique feinte de Halilhodzic sur une passe d’Ayache, Vincent Bracigliano se retrouve en position d’avant-centre.
L’ancien messin pousse un peu trop son ballon mais le récupère avant que Capljic ne le lui chipe. Radanovic se met sur la trajectoire mais il est mystifié par un grand pont. Bracigliano entre dans la surface où il retrouve Radanovic qui n'a pas lâché l'affaire. Le Nantais crochète et s'ouvre la voie du but. Dans un ultime effort, le numéro 6 nantais voit Omerovic, le gardien aux abois, plonger un peu au hasard. Il le lobe d'une frappe de l'intérieur du pied droit.
”Quatre touches à zéro”
La Beaujoire est en transe. Son équipe joue un match quasi-parfait sous les yeux de la France entière. Mené par un José Touré des grands soirs et un Fabien Debotté plus battant que jamais, Nantes trouve sa vitesse de croisière et son jeu irrésistible. En toute fin de match, sur une ultime offensive menée par Halilhodzic, Loïc Amisse inscrit un quatrième but et clôt une soirée qui aura donné, le croirez-vous, le sourire à Jean-Claude Suaudeau.
Complètement sous le charme, le journaliste Bruno Lautrey sort sa plume la plus lyrique : “Cette rencontre européenne est la plus belle, la plus aboutie depuis que le FC Nantes a goûté aux joutes de l’UEFA" écrit-il, ajoutant un peu plus loin : "Les Mousquetaires de Suaudeau ont vaincu par quatre touches à zéro (…) La botte de Nantes est aussi efficace que celle de Nevers (…) Le mouvement débute par une mainmise sur l’entrejeu, se poursuit par des velléités offensives, et se termine par une estocade tranchante, comme une épée de Tolède".
Tout Nantes, décidément, semblait inspiré ce soir-là.