Anton Raab est l’une des premières grandes figures de l’histoire du FC Nantes. L’équipe naissante, alors dirigée par Aimé Nuic dans un Nantes dévasté par la guerre, avait fait appel à ce grand gaillard blond dont le fort accent allemand trahissait l’origine. Mais ses performances sur le terrain en avaient rapidement fait le capitaine de l’équipe lancée pleine d’incertitude dans le championnat de deuxième division. A 31 ans, Anton Raab pouvait enfin taper dans un ballon plein d’insouciance, un plaisir dont la vie l'avait privé jusqu’alors.

Une vie de combat

Anton Raab est né à Francfort juste avant la Première Guerre mondiale à laquelle a participé son père pour en revenir très touché psychologiquement. A l’âge de vingt ans, Anton Raab voit se hisser au pouvoir un homme dont il combat l’idéologie avec force. Militant communiste et anti-nazi, il est arrêté par la Gestapo et emprisonné à Kassel où il est interrogé et torturé. Il s’évade au bout de deux ans et se retrouve en France, à Forbach, d’où il rejoint Paris puis Nantes, au club de la Saint-Pierre.

Alors qu’il rejoint le Stade rennais, la guerre pousse Anton Raab à la clandestinité. Il doit d’abord masquer son accent allemand qui aiguise la méfiance des autorités françaises, puis doit se cacher de l’occupant allemand qui recherche toujours l’évadé de Kassel.

Anton Raab se couvre alors sous une fausse identité.  Il revient à Nantes et se cache pendant trois ans dans un grenier du quartier Sainte-Thérèse. Les bombardements de 1943 le poussent ensuite dans la commune de Treillières. Ce n’est qu’à la fin de la guerre qu’il peut enfin retrouver sa liberté et vivre au grand jour.

De la clandestinité à la lumière

Forcé de mentir tout au long de sa clandestinité, Anton Raab a été forcé de vivre avec quelques petits mensonges sur son passé. On a souvent clamé son courage quand, jeune junior de l'Eintracht Francfort, il avait refusé de lever le bras au moment des hymnes avec l’équipe nationale allemande. Tout indique aujourd’hui que ce qu’il disait n’était pas toujours vrai, mais qu’en ces périodes troubles, mentir était aussi une forme de résistance.

Le journaliste Denis Roux a publié en 2022 un ouvrage sur le joueur du FC Nantes, “Anton Raab, militant anti-nazi et homme fort du FC Nantes” aux éditions La Geste, où il revient sur son parcours hors du commun et dévoile les zones où il a quelque peu dribblé la vérité : “J’ai commencé à vérifier les faits en épluchant des archives allemandes puis françaises, explique l’auteur. J’ai découvert une histoire différente de celle qu’il racontait et finalement plus émouvante.”

Le samedi 16 septembre 2023, dans le cadre des Journées du Patrimoine à Nantes, Denis Roux anime une conférence consacrée à Anton Raab, où il s’agira également d’évoquer les débuts du FC Nantes et la vie nantaise pendant et après la guerre. L'événement se déroule au passage Sainte-Croix (salle du Prieuré), 9 rue de la Bâclerie à partir de 18 h 30. Entrée libre pour tous les passionnés d’histoire et de sport.

J’ai découvert chez cet homme un incroyable appétit à vivre, une intelligence pratique, un courage hors-norme et une faculté à se sortir de situations inextricables. Il avait l’art du contrepied. Ce qui lui a permis de se construire une sacrée vie.” (Denis Roux)