Crédit Photo : asmonaco.com


Nous sommes le samedi 23 septembre 2017, à Décines-Charpieu, dans la banlieue de Lyon. L’Olympique Lyonnais et le Dijon FCO sont dos à dos au Groupama Stadium. Bruno Génésio tente donc le tout pour le tout pour arracher la victoire, et lance le jeune Willem Geubbels, à peine 16 ans dans le grand bain de la Ligue 1. Son entrée ne changera rien à l’issue de la rencontre (score final 3-3), mais les supporters lyonnais présents au stade auront assisté aux premiers pas de celui que l’on annonce comme un véritable phénomène. Pourtant, rien ne prédestinait le jeune Geubbels à devenir l’un des plus grands espoirs de l’OL. « Il a eu une progression vraiment atypique, estime Jonathan, supporter et co-créateur du site Café du Commerce OL. En U13/U14, c’était un joueur lambda. C’est à partir des U15, quand il est arrivé sur les grands terrains qu’il s’est libéré. Il évoluait en pointe, et c’est devenu une évidence, il commençait à être très au-dessus physiquement, et était vraiment adroit devant le but. »


« On a jamais vu une telle progression chez les jeunes de l’OL. »

Jonathan, supporter de l'Olympique Lyonnais

 

Willem Geubbels empile les buts lors de sa première saison avec les U15. Il est alors directement surclassé en U17, et surprise, malgré le changement de niveau son rendement reste le même. « C’est à ce moment là que je l’ai vu jouer pour la première fois, se rappelle Jonathan. Il était avec la génération des Caqueret, Gouiri, Bard, et ça a été l’explosion… mais une explosion fulgurante. Il met une vingtaine de buts sur la saison en étant surclassé. On a jamais vu une telle progression chez les jeunes de l’OL. Il se procurait énormément d’occasions notamment grâce à sa vitesse. En revanche il avait beaucoup de déchet car il jouait parfois sur un côté, et il perdait beaucoup de ballons. »

Suite à cette saison en U17, le nom de Willem Geubbels est sur toutes les lèvres, et pas seulement du côté de Lyon. Les performances précoces du jeune attaquant commencent à se faire savoir en France. « À partir de là, le club le prend vraiment au sérieux, et va avoir envie de lui montrer. Il commence sa préparation avec les pros, et débute en équipe réserve. En N2, il commence très fort avec 5 buts en 6 matchs, à tout juste 16 ans. » Suite à ses performances Geubbels est donc intégré au groupe professionnel, et effectue donc ses débuts contre le DFCO. Au total, il entrera à quatre reprises, dont une fois contre l’Atalanta en Europa League. Jonathan se rappelle bien de ses débuts : « ça ne se passait pas très bien parce qu’il est utilisé comme ailier, alors que Geubbels est clairement un attaquant de pointe. Mais c’est normal, quand on lance des jeunes attaquants, il faut qu’ils se fassent les dents sur le côté, et s’ils performent on leur donne la possibilité d’évoluer dans l’axe. »

 

Un transfert record à Monaco, puis une avalanche de blessures

Malgré des performances moyennes, l’Olympique Lyonnais souhaite conserver son prodige de 16 ans. Problème, les négociations autour de son premier contrat professionnel coincent, malgré la confiance que lui accordent les dirigeants lyonnais. « Dans l’histoire du centre de formation de l’OL, Geubbels est une anomalie, analyse Jonathan. On n'a pas vraiment d’autres exemples d’espoirs qui sont partis aussi tôt. Des échos que l’on a eus, le joueur était plutôt favorable à l’idée de rester à l’OL, ce sont plus ses parents qui ont poussé pour qu’il parte à Monaco. L’ASM proposait des sommes astronomiques aux jeunes. Pour l’OL c’était dur de suivre. »

La suite de la carrière du jeune attaquant s’écrira donc du côté du Rocher. Suite à un transfert record de 20 millions d’euros, du jamais vu en France pour un joueur de 17 ans, Willem Geubbels paraphe son premier contrat pro avec l’AS Monaco. « C’est vrai qu’on l’a payé cher, s’exclame Quentin Samson, supporter monégasque. Je pense que le but, au moment de l’achat, était de le vendre cet été, mais plus à 60 qu’à 6 millions (ndlr : OA négociée par le FCN pour le prêt de Geubbels). C’était l’époque où l’on ratissait les centres de formation français, on voulait que ce soit le nouvel Anthony Martial que l’on avait aussi pris à Lyon. »

Fraichement arrivé à Monaco, Willem Geubbels est sélectionné par Leonardo Jardim dans le groupe pour affronter Nantes à la Beaujoire, dans le cadre de la première journée de Ligue 1. Mais il apparaîtra pour la première fois sous le maillot du club de la principauté la semaine suivante, 7 petites minutes à Louis II contre le LOSC. La suite ? C’est le début du calvaire, Geubbels enchaine les blessures. Genou, cuisse, ischio, puis ligaments croisés, tout y passe. Il reprend le chemin de l’entrainement en février 2020, mais pas de bol, la crise sanitaire l’empêchera de retâter le cuir en match officiel. Au total, il s’écoulera deux ans et cinq jours entre le premier et le deuxième de Ligue 1 de Willem Geubbels avec l’AS Monaco.


« Il faut vraiment qu’il trouve de la continuité »

Quentin Samson, supporter de l'AS Monaco

« La saison dernière, on l’a un peu plus vu, 300 minutes environ, explique Quentin. Il marque d’ailleurs son seul et unique but avec Monaco contre le FC Nantes, je ne sais pas si vous connaissez… Il a été titulaire à deux reprises contre le PSG et Lorient, mais il se fait remplacer à la mi-temps sur les deux matchs. Sinon ce ne sont que des petits bouts de matchs où il rentre 30 minutes grand maximum. Au total, Geubbels prendra part à 14 rencontres de championnat, pour une moyenne de 20 minutes par match. Un bilan très faible, terni par une nouvelle blessure au métatarse, mais cette saison reste à ce jour la plus complète de l’attaquant de 20 ans.

Sur le peu de temps qu’il l’a vu joué, Quentin Samson a tout de même décelé des qualités chez le jeune attaquant monégasque : « Il a un profil particulier, il est assez grand mais très mobile, assez athlétique, rapide. Il est un peu bon partout, même si il peut parfois pêcher techniquement. Devant le but, on a vu des choses intéressantes, d’autres un peu moins bonnes. C’est dommage de ne pas l’avoir vu davantage, mais avec Ben Yedder et Volland devant lui, le travail était souvent fait avant qu’il rentre. » Jonathan, notre supporter de l’OL, complète les propos : « Au niveau du profil, toutes proportions gardées, je le compare beaucoup à Aubameyang à ses débuts. Il avait du mal techniquement et au niveau de la compréhension du jeu en début de carrière. Geubbels a les mêmes lacunes, mais aussi les mêmes points forts. »

Alors, à quoi doit-on s’attendre à Nantes ? Randal Kolo Muani devrait rester le choix numéro 1 d’Antoine Kombouaré dans la hiérarchie des attaquants, mais Geubbels peut-il s’imposer dans la rotation à la place de Renaud Emond et Kalifa Coulibaly ? « Geubbels est un joueur qui va exploiter la profondeur, il n’est pas fait pour toucher le ballon dans les phases de possession. Quand il touche trop le ballon, ça commence à être compliqué. Sa réussite dépendra évidemment de sa condition physique, mais aussi de la manière dont Antoine Kombouaré va l’utiliser », analyse Jonathan, complété par Quentin Samson : « Il faut vraiment qu’il trouve de la continuité, qu’il arrête de se blesser même s’il n’en est pas responsable. L’important pour lui va être d’enchainer les matchs, c’est clairement ce qu’il lui manque. Geubbels peut jouer seul de par ses qualités physiques naturelles, mais je pense que ça peut-être intéressant de l’associer à Kolo Muani, peut-être dans une fin de match dans un premier temps. Passez le conseil à Antoine ! »


L'avis des supporters par rapport au recrutement de Willem Geubbels


Antoine Kombouaré aurait préféré recruter Matthias Phaëton, qu’il a connu lorsqu’il entraînait Guingamp. Seulement, les conditions demandées par le club breton ont refroidi la direction, et Mogi Bayat, l’homme à qui l’on donne trop d’importance, a poussé pour recruter l’attaquant de l’AS Monaco. Coach Kombouaré a donc un peu plus d’une semaine pour juger son nouvel élément, et trouver dans quel rôle l’utiliser. Pour le FC Nantes, la réussite du pari Geubbels pourrait être une excellente affaire tant sportive qu’économique, car l’option d’achat de 6 millions d’euros pour un joueur de ce potentiel est abordable. Mais son début de carrière pose évidemment question. En quatre saisons chez les professionnels, le natif de Villeurbanne n’a passé que 494 minutes sur le terrain. Au final, à l’aube de ce nouveau défi, la pression est surtout sur les épaules de Willem Geubbels, qui tient peut-être là sa dernière chance de véritablement lancer sa carrière en Ligue 1.