Il avait été annoncé, il est désormais acté. Le départ de Vahid Halilhodzic à la tête du FC Nantes s'est fait un soir d'Août, dans une Beaujoire à peine remplie, après un match nul face au Genoa (1-1). Une sortie par la petite porte qui semblait être inévitable au vu des tensions qui trainaient depuis quelque temps.
Une bonne nouvelle pour les jeunes ?
Bonne ou mauvaise chose, la démission de Vahid a fait réagir. Et hormis l'amour que tous les supporters Nantais (ou du moins le respect) ont pour l'ancienne légende du club, certains sont plutôt satisfaits de le voir s'en aller. "Ce n'est pas une si mauvaise nouvelle puisque cette décision s'accompagne d'une volonté, du moins une communication, de miser davantage sur les jeunes", raconte Mat, dont l'amour pour le club se transmet de génération en génération.
Jason, 22 ans, fan depuis l'époque de Landry Chauvin est aussi de cet avis : "En fin de saison dernière, j'avais tendance à me prononcer pour un départ de Vahid notamment à cause de sa frilosité à vouloir faire jouer nos jeunes prometteurs et à leur donner sa confiance malgré des performances plutôt satisfaisantes. Même une place sur le banc leur aurait suffi mais il a préféré les mettre à l'écart de la feuille de match, ce qui m'a gêné personnellement."
Faire jouer les jeunes est le premier argument qui était reproché au Bosnien l'an passé. "Pour moi c'est un soulagement qu'il parte coach Vahid, il faisait tout pour que ça pète. Choisir des joueurs hors de prix niveau mercato, ne pas faire jouer les jeunes alors qu'il y a deux belles générations qui ont réussi la saison dernière. Et le summum c'est partir une semaine avant le reprise du championnat. Il a pris le club en otage, en attendant de savoir si le Maroc le choisissait ou pas", explique Yoann, qui a connu les belles années 90.
Avec tout le respect qu'il lui doit, Floran, exilé à Paris, est plutôt convaincu que le technicien bosnien était un blocage à l'émergence de jeunes : "Je pense que la dynamique des équipes de jeunes ces dernières années justifie que l'on fasse le choix de la formation, qui est l'ADN de notre club et Vahid semblait aux antipodes de ce projet."
Matthias, lui, y voit la fin d'un épisode compliqué au sein du club : "Je pense également que c'est une bonne chose pour les relations en interne... moins de tensions notamment."
Une question de timing
Ce qui gêne aussi les interrogés à propos d'un énième départ (pour ne pas dire quinzième), c'est le timing en rapport avec le début de la saison. "Content de son départ oui, du timing non... Il est désastreux", avoue Robinson. "Le prochain entraîneur va avoir seulement une semaine et aucun match de préparation pour préparer son équipe pour la première journée à Lille. Le championnat n'a même pas commencé que l'on part déjà dans de mauvaises dispositions."
Une petite semaine sera donnée au prochain entraîneur. Un timing trop serré cumulé à un climat instable, c'est réellement ce qui dérange le plus Yohann, 15 ans : "Les joueurs ont à peine le temps de s'adapter avec le coach, qu'il y en a un nouveau qui débarque 3 mois après. Ce n'est pas possible ! Ce n'est pas comme ça que le club avancera et ira en coupe d'Europe. Pas de stabilité, pas d'ambition."
"C'est pas parce que tu possèdes un restaurant que tu es un chef"
Une autre partie des fans du FCN est indignée par la gestion de ce dossier et n'hésite pas à pointer du doigt la direction du club. D'après Richard, "une légende de notre club ne devrait jamais être traitée ainsi. Vahid a tenu tous ses engagements vis-à-vis du club et les Kita (Franck et Waldemar, ndlr) n’ont pas tenu leurs promesses. J’ai souvenir de la première conférencem de presse de Vahid et Kita, manifestement les choses étaient claires à ce niveau, le sportif ça devait être lui, et finalement, il s’est retrouvé dans la position où l’ensemble des recrues lui ont été imposées."
De son côté, Ewan, arrivé juste après les belles années nantaises, aimerait que la direction du club desserre la vis. "Le problème c'est que le sportif et la direction sont deux choses distinctes. Kita ne sait pas faire mais en est persuadé. Ce n'est pas parce que tu possèdes un restaurant que tu es un chef, quand on ne sait pas faire quelque chose on délègue à des gens qui savent et on les laisse bosser."
Un reproche qu'Aurélien confirme, lui qui a vu Moldovan marquer pour son premier match à la Beaujoire : "Le problème du FCN n'est pas tellement de savoir quel impact aura le départ de Vahid pour la saison prochaine, ni même quelles recrues vont arriver, quels joueurs vont partir, quel classement on peut espérer... le problème structurel du club, c'est sa direction. Son incapacité à avoir une vision à long terme, à laisser les techniciens travailler, à leur donner les moyens, à établir une stratégie pour le club et à s'y tenir. C'était vrai en 2007, lorsque Kita a racheté le club. Le départ de Vahid ne fait que rappeler que c'est toujours aussi vrai en 2019, 14 entraîneurs et quelques centaines de joueurs plus tard."
Un ras le bol que partage aussi Geoffrey : "Depuis quelques temps, chaque année, c'est la même histoire : zéro projet sportif, zéro remise en question de la part de la direction et j'en passe. À noter tout de même que notre meilleure intersaison ces dernières années est pour moi l'année où l'on a été interdit de recruter, c'est dire". Il voit tout de même le départ de Vahid comme un choix raisonnable pour lui et le club. "On va peut-être enfin construire quelque chose sur le long terme même si le nouvel entraineur n'arrive pas dans des conditions optimales et que un projet sur le long terme me semble complètement impossible avec les Kita".
Dire merci à Vahid pour ce qu'il a fait
Heureux ou tristes, satisfaits ou indignés de son départ... la grande majorité de ceux qui sont venus témoigner pour cet article a tenu à remercier Vahid Halilhodzic : "Vahid c'est une grande figure à Nantes et s'il n'a pas fait une année brillante, je pense qu'il n'a pas écorné son image. Il a fait avec ce qu'il a pu et a sauvé le club d'une descente", raconte Ewan.
"Je suis reconnaissant du travail de Vahid lors d'une saison bien compliquée. Un numéro neuf emblématique du FC Nantes dans cette période délicate, c'était ce qu'il fallait. L'image du match contre Saint-Etienne restera à jamais. Et pour ce qu'il a montré pendant ce drame, on ne peut que le remercier et être reconnaissant", déclare Mat.
Yo a tenu aussi à lui dire merci : "Il faut dire merci à Vahid pour nous avoir sauvés de la relégation, et aussi une image qui m'a marqué et restera à jamais gravé dans ma mémoire, ses larmes lors de la disparition d'Emiliano Sala."
La Maison Jaune tient aussi à remercier Vahid Halilhodzic pour son travail à la tête de l'équipe première, pour son amour envers le FC Nantes, pour avoir vécu le mois de Janvier le plus compliqué de l'histoire du club comme un véritable être humain, et pour avoir réussi à maintenir l'équipe dans l'élite.
Photographie : Gérald Mounard