Comment avez-vous commencé dans le football ?

J’ai commencé à l’âge de six ans à Saint-Étienne de Montluc avec les garçons. J’ai joué pendant sept saisons avec un effectif masculin. Ensuite, je suis partie à Saint-Herblain.

Pourquoi avoir fait le choix du football au moment où la pratique féminine était quasiment anonyme ?

C’est parce que je jouais souvent avec mon frère ou avec mon père. À cette époque, j’hésitais avec le basket. Mais comme je me défoulais plus au football, j’ai suivi cette voie.

À Saint-Étienne de Montluc, était-ce simple de se faire une place au milieu d’un effectif de garçons ?

J’ai eu la chance d’être très bien accueillie et entourée, que ce soit au niveau des dirigeants et des joueurs. Il y avait du respect et j’en garde de très bons souvenirs. Je sais que ce n’est pas la majorité des cas mais pour mon expérience personnelle, on a vraiment tout fait pour que je me sente bien avec les garçons.

En 2007, vous signez en D2 avec le club de Saint-Herblain car à 15 ans, vous ne pouvez plus jouer dans une équipe mixte. Le club est-il venu vous chercher ou est-ce vous qui avez fait le choix ?

Personnellement, je n’avais pas trop d’idées. Comme j’étudiais au lycée La Colinière, je côtoyais des filles qui y jouaient. Le coach est venu vers moi et, de fil en aiguille, les choses se sont faites naturellement.

Dans une précédente interview, vous aviez déclaré avoir le regret de ne pas avoir joué en D1. Le club de Saint-Nazaire ne vous a pas permis de franchir ce palier ?

Il y a une saison où on était tout proche de cet objectif [NDLR : en 2011-2012]. Ça s’est joué sur le dernier match. C’était le moment où je pouvais prétendre à jouer dans l’élite mais ça ne s’est pas fait. Et dans la suite de ma carrière, je n’ai pas retrouvé cette opportunité.
À cette époque, malgré mon jeune âge, j’avais l’expérience de la D2. Je ne me disais pas que j’avais le niveau de D1 mais j’avais envie de me tester, voir si j’étais capable de faire mieux.

En 2014, vous rejoignez le club de Sainte-Luce-sur-Loire ce qui vous fait descendre d’une division. Quelle est l’origine de ce changement ?

J’étais en manque de temps de jeu et j’ai eu un différend avec mon entraîneur de l’époque. Dans tous les cas, il fallait que je quitte le club.

 

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Vous signez au FC Nantes en 2016. Qu’est-ce qui vous a plu dans ce projet ?

J’avais été contactée par le coach de l’époque, Jonathan Raoul. À Sainte-Luce, après trois saisons, j’avais fait un peu le tour de la question car au niveau R1, on joue toujours les mêmes équipes. En signant au FC Nantes, je devais arriver pour jouer en DH (l’actuelle R2, quatrième division) mais, avec le souci dû au manque d’arbitres de club, on a dû rejouer dans le championnat de district 44 (cinquième division). Quand on n’a jamais connu ce niveau-là, ça fait un peu bizarre mais on avait des bons entraînements. Ça nous a permis d’apprendre à nous connaître entre joueuses. Pour une année de transition avec l’arrivée de nouvelles joueuses, peut-être que ce n’était pas plus mal.

En 2018-2019, c’est la saison de la montée en D2 et vous étiez la capitaine de l’équipe. Sentiez-vous le groupe capable d’atteindre cet objectif malgré la présence d’équipes solides comme Le Mans ?

Honnêtement, on avait une équipe très soudée qui s’entendait vraiment très bien. Je me disais qu’on pouvait battre n’importe quelle équipe. C’est assez rare de se retrouver dans ce genre de situation. C’est comme si rien ne pouvait nous arrêter. On se donnait à fond les unes pour les autres.

Début juin 2019, c’est le barrage retour face au Mans à la Jonelière. Qu’avez-vous ressenti au coup de sifflet final ?

Beaucoup d’émotions et de fierté. On représente le FC Nantes, c’est une image en Loire-Atlantique et ses alentours. Réussir à ce que ce club emblématique parvienne à jouer au niveau national, c’est une grande fierté ! Et c’est aussi la satisfaction d’une saison qui était compliquée : on n’avait pas le droit à l’erreur, il fallait rester concentrées. D’un week-end à l’autre, on gardait notre sérieux malgré les résultats. Alors une fois la montée obtenue, il y a un relâchement et énormément d’émotions.

Sur les matchs de barrage d’accession à la D2 à La Jonelière, il y avait une forte affluence. Est-ce que ça rajoute une pression supplémentaire ou un supplément d’âme pour atteindre l’objectif ?

Je ne dirais pas une pression supplémentaire. Peut-être que c’était le cas pour les plus  jeunes de l’équipe mais personnellement, j’arrivais à faire la part des choses et c’était du positif. On est contentes de voir qu’il y a du monde qui s’intéresse au football féminin.

Lors de la première saison du FC Nantes en D2, vous jouez finalement avec l’équipe réserve. Était-ce un choix de l’entraîneur ou une volonté personnelle ?

C’était un choix de ma part : je connaissais déjà la D2 et je n’étais plus prête à faire tous les sacrifices pour me montrer performante tous les week-ends. J’ai laissé ma place à des filles plus jeunes et plus motivées.

Aujourd’hui, vous jouez en Régionale 1 à Orvault sous les ordres de Guillaume Moullec. Le projet vous semblait plus adapté ?

Sur le même principe de mon départ de Sainte-Luce, j’avais fait le tour à Nantes où l’environnement était trop sérieux, je voulais retrouver le plaisir de jouer sans me prendre la tête. Guillaume a complètement répondu à mes attentes à ce sujet. Il a su me convaincre. Et quand je vois le résultat : on est là pour s’amuser et être performantes.

Au niveau amateur, qu’est-ce qui est le plus dur à concilier : allier le boulot et les entraînements en semaine ou gérer la vie de famille et les matchs le week-end ?

Quand j’ai débuté en D2, ce sont les week-ends qui étaient le plus dur car on partait pour deux jours. Après, j’ai toujours eu la chance de pouvoir adapter mes entraînements, ça se conciliait bien avec le boulot. Donc c’est plutôt les fins de semaine qui étaient compliquées. Après, en R1, le plus gros déplacement dure 2h30, c’est plus facile.

Avant l’arrêt du championnat, vous avez affronté la réserve du FC Nantes en la battant 3-1. N’est-ce pas mentalement perturbant de jouer un derby face à d’anciennes coéquipières ?

Je dirais plutôt que c’est motivant. Quand on joue contre son ancien club, on a envie de montrer qu’on est capable de faire de belles choses. Il y avait beaucoup de hargne et d’envie pour ce match.

 

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Que pensez-vous de l’équipe senior féminine du FC Nantes et de sa volonté d’atteindre l’élite ?

Ils mettent en place les moyens nécessaires. Ils ont des entraînements quasiment tous les jours, un staff étoffé pour répondre aux besoins. Dans le recrutement des joueuses, je pense qu’ils ont trouvé des filles qui s’adaptent très bien à la vie du groupe : beaucoup de sourires et de bonne ambiance. Pour moi, c’est la clé pour pouvoir monter.

Dans sa seconde interview, votre coach Guillaume Moullec disait que l’objectif était de mettre de l’envie et de la détermination sans forcément parler de jouer la montée. Est-ce un sujet de discussion au sein du groupe ?

C’est déjà arrivé, ce n’est pas un sujet tabou. Certaines joueuses ont envie d’atteindre la D2, objectif manqué il y a deux ou trois saisons. Globalement, on a envie d’être le plus haut dans le tableau, ça permet à tout le monde de s’y retrouver.

L’arrêt des championnats amateurs et le couvre-feu rend la pratique du football difficile. Comment le vivez-vous ?

C’est pas évident. Quand on a pris l’habitude de faire deux à trois entraînements par semaine, ça met un petit coup de ne plus en faire du tout. Le moral est forcément moins bon. On a quand même une séance le samedi matin, donc ça fait du bien de se dépenser, de revoir du monde et de toucher des ballons.

Que manque-t-il à la D1 Arkema pour être plus performante ?

Il faudrait qu’il y ait plus d’équipes compétitives qui puissent rivaliser avec Lyon. Ça ajouterait de l’attrait à ce championnat et, tel un cercle vertueux, ça ferait plus parler et donnerait plus de visibilité, donc plus de moyens et plus de concurrence.

Et pour l’Équipe de France féminine ?

Difficile à savoir. De l’extérieur, c’est un peu comme le FC Nantes, quand il y a beaucoup d’individualités et que le collectif ne prend pas, on ne peut pas gagner. L’Équipe de France a énormément de talents mais ça ne suffit pas.

 

​​​​Merci à Solène Lancien pour le temps qu'elle nous a accordé 

Crédits photos : Gérald Mounard